La frigidité : d’où cela vient ?
Rares sont les femmes d'emblée insensibles au plaisir et qui le resteront toute leur vie. Le plus souvent, la frigidité se manifeste à la suite d'un choc, d'un conflit psychologique même inconscient, ou d'un événement médical anxiogène. Quelle qu'en soit l'origine, la frigidité est avant tout l'histoire d'une femme. D'un couple. Avec mille et une façons de vivre la situation...
La frigidité se définit par l'absence de satisfaction sexuelle durant les rapports ou par l'obtention d'un plaisir jugé insuffisant. Les femmes d'aujourd'hui ne sont pas plus frigides que celles des siècles précédents. La nouveauté, c'est qu'elles expriment beaucoup plus facilement leur plainte, et tant mieux !
« J'ai des difficultés pendant les rapports, est-ce que je suis frigide ? »
De plus en plus de femmes consultent directement pour ce motif ou sont envoyées chez le sexologue par leur médecin, preuve que le tabou tend à être levé, expliquent certains gynécologues. D'autres préfèrent en parler au détour d'une consultation de gynécologie :
- « Je crois que je ne suis pas normale » ;
- « je ne m'entends pas bien sur le plan sexuel avec mon mari » ;
- « j'ai des difficultés pendant les rapports ».
…sont les expressions les plus souvent employées.
Les femmes veulent réussir leur vie de couple et revendiquent le droit à une sexualité épanouie. Les professionnels de la santé l'ont bien compris. Aujourd'hui, d'ailleurs, c'est souvent le médecin qui soulève le problème en premier. La reconnaissance officielle de la spécialité de sexologue, la mise sur le marché de rééducateurs sensoriels et l'arrivée de nouveaux médicaments visant à favoriser le plaisir chez la femme témoignent aussi de cette prise de conscience.
Reste qu'il est difficile de mesurer le plaisir ! Si l'on en croit le modèle imposé par l'univers de la télévision et du cinéma, il n'y a pas d'orgasme sans hurlements ou démonstrations théâtrales.
Certaines femmes se croient ainsi frigides ou anormales, sous prétexte que leur plaisir demeure silencieux. Pour les mêmes raisons, beaucoup d'hommes pensent avoir affaire à un corps de glace, dès lors que leur partenaire joue les discrètes ou préfèrent les caresses à la pénétration. Et ce, d'autant qu'ils ont en permanence besoin d'être rassurés sur leur capacité à donner du plaisir !
Ces exemples sont dangereux, car ils font croire à des jeunes femmes, parfaitement "normales" qu'elles ne le sont pas. En effet, la plupart des jeunes filles ont un plaisir clitoridien très supérieur au plaisir vaginal. Ce dernier arrive souvent plus tard, parfois seulement vers la quarantaine, sans que l'on puisse expliquer pourquoi.
Mais faute de le savoir, certains couples se gâchent la vie. Certaines femmes se croient frigides mais en fait, elles obtiennent un orgasme clitoridien très satisfaisant mais un plaisir vaginal modéré.
Derrière cette croyance relativement fréquente, se cache la crainte de ne pas être comme tout le monde. Or, il n'y a pas de standard en matière de relations amoureuses. L'orgasme vaginal n'a pas plus de valeur que le clitoridien. D’ailleurs les deux passent par le clitoris, c’est juste une question de stimulation.
L'important n'est pas la façon dont une femme manifeste son plaisir et l'origine de ce dernier, mais la satisfaction qu'elle en tire. Et pour cause ! Lorsque le centre du plaisir, situé à la base du cerveau, est stimulé, il sécrète des endorphines aux propriétés euphorisantes. Et c'est bien sûr lors de l'orgasme qu'il en sécrète le plus.
Lors du premier rapport sexuel
La frigidité n'a, la plupart du temps, rien de définitif. Elle peut toucher n'importe qui, à différentes périodes de la vie. Certaines connaissent ce problème dès l'éveil de leur adolescence, avec parfois un rejet en bloc de la sexualité et des contacts physiques.
Dans ce cas, les valeurs sentimentales sont sublimées et placées bien au-dessus des relations sexuelles, jugées "sales" et "méprisables". Parfois, la frigidité se révèle lors du premier rapport sexuel et s'explique volontiers par l'inexpérience des deux partenaires : le jeune homme n'a pas forcément compris l'importance des préliminaires !
Elle peut aussi se manifester après un accouchement, notamment long et compliqué, en raison des changements survenus au niveau du périnée (certaines femmes craignent que leur cicatrice d'épisiotomie ne "lâche" au cours du rapport).
Le nouveau statut de maman peut également être difficile à concilier avec celui d' "amante" et de femme active. Dans la dépression du post-partum, l'absence de plaisir se prolonge anormalement au-delà de trois mois après l'accouchement.
La frigidité lors des périodes de la vie plus délicates
Le cap de la ménopause est encore une situation à risque, surtout quand elle est ressentie comme une atteinte à la féminité. Lorsque la vie sexuelle du couple n'était pas satisfaisante, la ménopause aggrave le problème et peut servir de justificatif à l'arrêt des rapports. Alors que si le couple avait auparavant une vie sexuelle harmonieuse, il surmonte sans trop de difficultés cette étape délicate.
En agissant sur la lubrification du vagin et la tonicité du périnée, le traitement hormonal substitutif a considérablement amélioré la sexualité des seniors. Dans le cadre d'une stérilité, la nécessité d'avoir des rapports programmés et l'intrusion de l'équipe médicale dans l'intimité du couple ajoutent au traumatisme de la nouvelle. Cela ne favorise guère "l'abandon de soi" au cours des rapports.
Enfin, une situation conflictuelle, la perte d'un proche ou le dépistage d'une maladie grave sont également des périodes sensibles, en raison de la baisse de libido. Quand on a la tête pleine de sentiments négatifs et angoissants, trouver le chemin du plaisir n'est pas chose facile..
Les causes organiques sont à rechercher en premier lieu, même si elles sont. Il peut s'agir d'un déficit hormonal (le post-partum et la ménopause en sont deux exemples), d'une complication neurologique ou vasculaire du diabète, ou de la prise de certains médicaments, dont les tranquillisants.
Le traitement de ces causes ou la suppression du médicament responsable sont alors indispensables, mais pas toujours suffisants : qu'elle soit d'origine organique ou non, la frigidité (comme la panne sexuelle chez l'homme) finit presque toujours par avoir un retentissement psychologique.
Le problème de la culpabilité
Difficile de savoir combien de femmes présentent ponctuellement ou durablement une frigidité. En sexologie, on estime qu'environ 20 % des consultations sont motivées par une impossibilité d'atteindre l'orgasme.
A côté de ces femmes qui consultent spécialement pour ce problème, d'autres ne s'en plaignent pas d'emblée. Parmi ces femmes insatisfaites, certaines déclarent simuler du plaisir pendant les rapports. Ce phénomène n'a rien d'exceptionnel.
Lorsqu'on leur demande pourquoi, les réponses sont souvent les mêmes : Pour éviter que leur conjoint les soupçonne de moins les aimer. Pour ne pas le contrarier, car il pourrait mal prendre le fait de ne pas arriver à lui donner du plaisir. Ou encore parce qu'il en a toujours été ainsi depuis le début de leur relation ; ne rien changer apparaît donc comme une solution de facilité.
Du moins à première vue. Car simuler n'est pas la solution. Outre la frustration au long cours qu'elle entraîne chez la femme, elle comporte des risques pour le couple : lui peut se sentir déçu s'il apprend les difficultés que sa compagne rencontre, tandis qu'elle renonce à résoudre ce problème.
Prenons l’exemple d’une jeune femme ayant toujours dissimulé à son mari le fait qu'elle n'a aucun plaisir avec lui, et ce, depuis leur premier rapport. Elle est pourtant capable d'atteindre l'orgasme en se caressant, preuve que son corps fonctionne normalement. C'est d'abord pour ne pas blesser son mari qu'elle lui a caché sa frigidité. Ensuite, elle s'est sentie "prise au piège" : lui avouer au bout de plusieurs années qu'elle n'a jamais eu de plaisir est impossible sans lui faire du mal. En fait, elle pourrait lui dire qu'elle a un récent problème de frigidité, apparu à la suite de soucis divers, mais elle n'en fait rien. De même, elle simule pour le préserver, quel que soit le prix à payer.
Cet exemple, qui est loin d'être un cas particulier, illustre que, pour une femme, "faire semblant" n'est pas un simple mensonge ou une basse tromperie. C'est beaucoup plus complexe que cela. Or, si la femme se montre volontiers protectrice à l'égard de son conjoint, ce dernier adopte une attitude plus distante par rapport à la frigidité. Lorsqu'il est invité à consulter en couple, il a tendance à se dérober ou à dire que c'est le problème de sa femme, qu'elle doit donc le régler toute seule.
La frigidité n’est pas qu’un problème de femme
C'est mal connaître les conséquences de la frigidité ! Lorsque le rapport ne se passe pas comme l'homme et la femme le souhaiteraient, tous deux en subissent les répercussions. Pour les couples confrontés à la frigidité, la culpabilité est souvent prédominant.
Elle s'en veut de ne pas mieux répondre à ses caresses. Lui se reproche de ne pas la satisfaire. Cela ne peut qu'aggraver leur angoisse et rendre encore plus difficiles leurs rapports sexuels. La première étape est donc de se rassurer : la frigidité pose un problème, certes. Mais c'est un problème pour lequel il n'y a pas de responsable. De plus, chacun doit comprendre que la frigidité ne remet pas l'amour en question. Parler de son absence de plaisir à son partenaire peut même être une belle preuve d'amour. C'est peut-être même là la clé de la réussite : être deux, solidaires. Car le non-plaisir est un problème de couple, pas juste une histoire de femme. On apprend beaucoup en cherchant à comprendre comment s'est installée la frigidité et comment elle est acceptée dans le couple.
À noter : Il ne faut pas oublier que les couples n'ont pas tous les mêmes envies ni les mêmes besoins : un plaisir qui serait qualifié d'insuffisant par un couple peut combler un autre, du fait de liens affectifs très forts et d'une grande tendresse. L'important est que chacun ait une vie sexuelle harmonieuse et trouve son équilibre, en se faisant aider, si besoin, d'un spécialiste.
Se donner du temps
Certaines femmes ont appris à vivre avec leur frigidité ou leur anorgasmie pendant des mois ou des années. Réinvestir son corps, se concentrer sur ses sensations, dénouer les conflits : rien n'est insurmontable, mais cela prend du temps. En l'absence de cause organique identifiée (situation la plus fréquente), une prise en charge psychologique s'impose.
Les femmes particulièrement anxieuses peuvent bénéficier d'une psychothérapie comportementaliste, visant à leur permettre de mieux gérer leur stress. Celles qui veulent tout partager avec leur conjoint vont préférer les thérapies de couple.
La frigidité peut arriver après bébé...
À côté de la prise en charge psychologique, une rééducation périnéale a parfois été proposée, notamment lorsque la frigidité est apparue après un accouchement. Elle est actuellement remise en cause par certains sexologues pour qui la frigidité du post-partum n'est pas une simple question de muscles distendus, mais un problème de traumatisme lié à l'accouchement ou de surinvestissement pour l'enfant.
Quant à la rééducation sensorielle, elle fait appel à deux électrodes indolores pour stimuler les muscles impliqués dans les rapports sexuels : ces appareils aident certaines femmes à prendre conscience des réactions de leur corps et de lever une certaine pudeur qui les empêche de se détendre lors des rapports.
Les médicaments censés faire naître le plaisir chez la femme sont encore à l'étude : comme pour le Viagra chez l'homme, leur arrivée pourrait inciter les femmes qui hésitent encore à consulter...
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