Le choc de l’annonce… puis la chirurgie
« Terrassée », « effondrée » « assommée » ... L'annonce d'un cancer du sein s'apparente à un séisme pour une femme. Toutes, même bien entourées, témoignent d'un sentiment de désarroi, de solitude. Le sein symbolise la vie, la maternité, la féminité, la sensualité...
Apprendre de surcroît que l'on va devoir subir une mastectomie (ou ablation), qu'il faut sacrifier un sein (ou deux) est un traumatisme supplémentaire : une mutilation physique, sexuelle et symbolique, vécue de manière différente selon les femmes. Heureusement, la prise en charge du cancer du sein ne se limite plus à l'élimination des cellules cancéreuses. Elle vise aussi à restaurer, autant que possible, l'intégrité physique et morale.
Qualité de vie, chirurgie réparatrice, soutien psychologique (encore insuffisant) entrent peu à peu dans la prise en charge des hôpitaux. Et des initiatives originales (soins esthétiques...) aident la femme touchée à se battre, accepter son nouveau corps et renouer le fil de sa vie.
Car guérir n'est pas exclusivement affaire de chirurgie et de chimiothérapie.
Dans ce cas, la reconstruction immédiate du sein (dans le même geste opératoire que l'ablation) ou la reconstruction secondaire (réalisée plusieurs mois après les traitements) prennent tout leur sens.
La reconstruction du sein est perçue comme une récompense
Mais c'est un long processus, qui s'effectue en plusieurs temps opératoires : dans le cas d'une ablation totale (peau du sein, mamelon et téton inclus), la forme du sein perdu est reconstruite grâce à un lambeau de peau et de muscle dorsal ou ventral, sous lequel on glisse une prothèse. Quelques mois plus tard, le téton sera remodelé, et l'aréole tatouée en deux temps. Des retouches interviennent souvent au cours du temps.
« Les répercussions sociales, sentimentales, familiales d'un cancer et d'une ablation sont telles qu'une opération de chirurgie réparatrice, aussi lourde soit-elle, se justifie largement, dit le Dr Cadubin, cancérologue. Il s'agit d'aider les femmes à mieux supporter leurs traitements, en leur offrant la meilleure qualité de vie possible ».
De plus, on constate que la préoccupation esthétique détourne en partie l'esprit de la maladie. C'est fondamental pour voir la suite sous un jour meilleur. La reconstruction aide les femmes à "ré-aimer" leur anatomie, malgré les cicatrices du corps comme de l'âme. Pour beaucoup de femmes, la reconstruction apparaît même comme une revanche sur le cancer : tant qu'à subir une opération, certaines en profitent pour demander de bénéficier d'une augmentation mammaire qu'elles n'ont pas osée jusqu'alors ! Mais il faut qu'elles soient conscientes que ce n'est pas leur sein qu'on va leur rendre, c'est une forme, pas une fonction ; un volume, pas des sensations ; elles doivent faire le deuil de leur sein d'origine, c'est essentiel pour pouvoir accepter et assumer au mieux la reconstruction mammaire.
Les femmes qui bénéficient de reconstruction immédiate sont parfois beaucoup plus exigeantes car elles n'ont pas connu, ou à moindre impact, le traumatisme de l'ablation. Celles qui ont eu une reconstruction secondaire sont reconnaissantes quel que soit le résultat, car elles ont vécu de plein fouet la mutilation et l'absence du sein.
Une femme en accord avec son nouveau corps lutte mieux contre la maladie
Pour oublier un moment la douleur et s'abandonner à d'autres mains que celles des médecins, l'association CEW (Cosmetic executive women) a ouvert des cabines de soins esthétiques dans plusieurs d'hôpitaux : depuis 1992, elles accueillent gratuitement les femmes en traitement.
Une initiative qui a démontré l'utilité quasi-thérapeutique de la beauté : astuces de maquillage pour restructurer un visage sans cils, ni sourcils ; manucure, importante quand pour tout horizon, on a ses mains sur le drap, ou épilation, bienvenue pour qui doit se présenter constamment au regard d'autrui... mais surtout, un dialogue qui s'instaure avec l'esthéticienne, une relation intimiste et douce, un contact apaisant qui atténue le mal de vivre, le rejet de son image, l'isolement, etc. difficiles à pallier par les soignants ou la famille.
« Pour moi, l'esthétique est un moyen de se réapproprier le corps qui a trahi et l'habiter à nouveau », estime Gaëlle Dos Santos, psychothérapeute à l'IGR. Certaines femmes, notamment dans les cas de cancer du sein avec ablation, se trouvent dans un état d'inhibition totale vis-à-vis de leur corps, elles ne veulent plus que personne ne les touche. Avec les soins esthétiques, on parvient à « renarcissiser la relation ».
Renouer avec les gestes de la féminité, c'est réapprendre à s'aimer, à s'occuper de soi en tant que personne, plus en tant que malade. Et une femme qui se sent à nouveau belle, en accord avec son nouveau corps, lutte mieux contre la maladie.
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