Qu’entend-t-on par maternage proximal ?
C’est l’ensemble des pratiques qui relient directement l’enfant au parent (allaitement pour la mère, portage pour les deux parents, cododo pour les deux parents..).
Ce sont des pratiques qui sont souvent pointées du doigt par les féministes, notamment blanches, car elles pensent que ces pratiques entravent la liberté des femmes.
Il est indéniable que l’ensemble des femmes sont confrontées à l’injonction de la maternité. Arriver à la trentaine sans avoir d’enfants ou le projet d’en avoir, suscite souvent des interrogations, des jugements, des remarques soit disant anodines mais qui sont pesantes au quotidien.
Pour autant, est-ce juste de renvoyer les mères hors des combats féministes? (j’ai même lu que l’injonction à la parentalité était comparée à de l’injonction à de la prise de drogue, pour signifier que la maternité est un truc nocif, OK!)
Est ce productif de les invisibiliser? de considérer que comme elles n’ont pas cette pression de la société, finalement elles ne sont pas vraiment concernées, ou en tout cas en moindre mesure?
Non. Pourquoi ?
Le maternage proximal n’est pas l’ennemi du féminisme
- C’est déjà assez compliqué d’impliquer les gens de façon générale dans le combat féministe, alors si on se met à les décourager des gens…
- Ca me semble contre-productif de se passer de femmes qui subissent pour certaines, la même chose que les autres. Une mère répond peut être à une norme de la société, ça n’en reste pas moins une personne qui subit le sexisme. Elles peuvent aussi éclairer sur d’autres injonctions/pressions. Et lire des mots blessants, comparant la maternité à des drogues…on se demande où on est.
- Parce qu’a priori elles font partie des gens qui élèvent des êtres humains miniatures destinés à façonner le monde de demain (c’est beau!). Ça pourrait aussi vous aider pour demain, si elles sont sensibilisées au féminisme et ses luttes.
- Parce que (breaking news), on peut être mère et ne pas avoir comme centre d’intérêt uniquement son ou ses enfants.
La plupart des mères adeptes du maternage proximal que j’ai pu côtoyer, rejettent le féminisme (merci une fois de plus à Elisabeth Badinter d’avoir descendu en flèche l’allaitement),ou ne s’en préoccupent pas. Pourtant, certains sujets les concernant sont mis en lumière (violence obstétricale, charge mentale…) mais c’est apparemment encore trop peu
Me concernant, je suis une convaincue par ce qu’on appelle le « maternage proximal » ET je suis militante féministe, à Féministes Plurielles en l’occurrence. Et souvent cela étonne que je trouve du temps et de l’énergie pour ça. Mais si j’ai envie de m’investir, c’est aussi pour ma fille, qui est concernée.
Il n’y a pas de meilleure mère qu’une autre, chacune fait ses choix et aucun ne devrait être plus respecté que l’autre, dénigré, ou invisibilisé.
L’allaitement, vaste débat
Des sujets comme l’allaitement sont souvent pointés du doigt par les féministes. Dire que l’allaitement est l’alimentation idéale et la plus adaptée déclenche des tollés. Pourtant c’est bien le cas. C’est prouvé. Du coup, le peu de campagnes pour l’allaitement qu’on voit (avec des vrais conseils), me paraissent les bienvenues. A une époque les multinationales du genre Nestlé avaient fait des campagnes pour dire que le lait artificiel était mieux que le lait maternel, ce qui a créé des problèmes alimentaires dans les pays où les femmes ne pouvaient pas payer ces laits.
Et tant pis si je me fais huer. Personne ne remet en cause le fait que le lait de la vache est adapté à son petit (on ne se verrait pas donner au petit autre chose que son lait d’ailleurs), ou n’importe quel animal. Chez l’humain c’est pareil. Est ce que ça veut dire qu’il faut inciter/forcer les femmes à allaiter? Non. Le lait artificiel est parfaitement adapté, il n’y a pas lieu de le remettre en cause. Et pas lieu de culpabiliser une femme qui ne veut pas allaiter, ou qui veut arrêter d’allaiter. Pour qu’un allaitement soit réussi, et/ou pour qu’une femme se sente bien (et du coup l’enfant aussi), il faut respecter ses choix.
Par ailleurs, même quand je l’évoque. En bref, comme beaucoup de sujets, on a souvent tort quels que soient les choix.
La parole aux concernées
Si vous ne connaissez rien sur l’allaitement, merci de vous renseigner. Parce que c’est aussi très agaçant de voir des gens parler, écrire sur l’allaitement, sans rien savoir. Merci d’arrêter de répand on raconte des choses fausses, on dévalorise).
Vous avez sans doute eu connaissance des articles qui évoquent les mères allaitantes en public, qui se font remonter les bretelles . Ça participe à toujours plus limiter le nombre de femmes dans l’espace public. Même quand tu fais le choix apparemment attendu, faut pas le faire n’importe comment, nom de diou !
Alors, mères féministes montrez vous!
Être adepte du maternage proximal ne veut pas dire être esclave de son enfant. J’ai cododoté, j’ai porté en écharpe (j’avoue que là c’était quand ce qu’il y avait de plus pratique pour circuler, tellement les trottoirs et tout en général est bien pensé pour les poussettes et les fauteuils roulants (non)…). J’ai allaité (18 mois en tout, et j’ai repris le taf au bout de 6 mois) et j’ai beaucoup de gens qui pourront témoigner autour de moi que ma fille n’a jamais été accrochée à moi, et que maintenant à 7 ans, elle fait sa vie (toute proportion gardée). Je ne suis pas une super maman, simplement une maman qui a fait certains choix et qui aimerait bien qu’on arrête de trouver ça bizarre.
Pour finir, ma situation fait que je suis un peu le cul entre deux chaises. Je ne me retrouve pas dans les mamans adeptes du maternage proximal, qui refusent ou s’intéressent peu aux combats féministes. Parfois je les comprends. Et je ne me retrouve pas non plus toujours dans un milieu militant qui occulte ces mères, voire les mères en général.
Voilà pourquoi je me reconnais dans le féminisme inclusif, et la position pro choix. Parce qu’il n’y a pas de binarité, de noir et de blanc. On essaye tous-tes de vivre nos choix du mieux qu’on peut.
Témoignage de Jessica.
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