Environ 20 % des bébés français naissent à la suite d'un accouchement déclenché artificiellement. Ce chiffre a presque triplé entre 1981 et 2015. Dans 50 % des cas, les raisons sont médicales : il faut vite sortir l'enfant avant qu'il ne souffre. Les autres cas concernent une demande de la mère ou de l'équipe obstétricale. On parle alors d'accouchement programmé.
Il arrive en effet qu'une future maman, dont le mari doit s'absenter ou qui ne peut faire garder ses autres enfants, souhaite prévoir le moment de son accouchement. Certaines femmes habitent loin de la maternité et craignent d'arriver en catastrophe. D'autres sont plus rassurées si l'équipe obstétricale est au complet au moment de la naissance. De leur côté, les professionnels préfèrent planifier leur travail plutôt que de faire face à plusieurs urgences nocturnes.
Une enquête menée en 2018 par l'INSERM montre que les maternités importantes disposant de moyens humains et matériels conséquents (salles de travail, anesthésistes...) sont celles qui réalisent le moins d'accouchements programmés.
Les petites unités, notamment du secteur privé, les pratiquent plus volontiers.
À lire aussi : Déclenchement de l'accouchement : tout savoir
Les spécialistes sont divisés sur la question
Des établissements manquent d'anesthésistes. Pour bénéficier de la péridurale (une anesthésie loco-régionale), une femme devra donc accoucher de jour, pendant les heures de présence du spécialiste. Il existe aussi des différences significatives entre les régions. Le taux de déclenchements est plus élevé dans la région parisienne et le Sud de la France.
Si certains médecins n'hésitent pas à donner un petit coup de pouce à la nature, d'autres sont plus réticents. Dans mon service, cette technique est proposée, jamais imposée. Nous ne déclenchons que si une femme le souhaite et y trouve un certain confort », dit le Dr Bernard Voigé, chef de service en maternité.
« Déclencher artificiellement un accouchement peut être simple dans certaines conditions, mais il faut aussi en mesurer les risques ». Dans son service, les demandes pour convenances personnelles ne sont acceptées que pour des raisons valables et si le danger pour la mère et l'enfant est réduit au minimum.
Plusieurs conditions à respecter
Programmer un accouchement n'est pas une intervention anodine. Des conditions s'imposent. La femme (sans pathologie particulière) doit avoir dépassé les 39 semaines d'aménorrhée, soit plus de huit mois et demi de grossesse. L'état du col de l'utérus commande le reste des opérations.
Il doit être suffisamment "mûr" pour que le travail puisse être déclenché sans danger. Les conditions étant remplies, la femme signe un formulaire stipulant qu'elle a été informée des modalités du déclenchement.
La technique la plus répandue consiste à suivre la femme au jour le jour, peu de temps avant la date présumée de l'accouchement. Le mûrissement du col est surveillé attentivement pour déterminer le moment le plus favorable au déclenchement. Le jour J, la future maman est installée en salle de travail, en principe tôt le matin. Elle est mise sous péridurale et les battements cardiaques du bébé sont enregistrés en permanence sous monitoring.
Une perfusion d'ocytocine (hormone post hypophysaire) provoque le début des contractions de l'utérus. La poche des eaux est rompue artificiellement. La femme entre alors dans une phase de travail normal. Cette méthode permet de gagner quelques heures sur la date théorique de l'accouchement.
Quelle que soit la méthode utilisée, le résultat n'est pas garanti. Il arrive que le produit n'ait aucun effet.
Il ne faut pas que les femmes viennent avec l'idée que l'accouchement aura lieu ce jour-là. Peut-être oui mais peut- être pas. Les praticiens ne font généralement pas plus de trois injections d'ocytocine.
Bien mesurer les risques
Mais le risque majeur est l'induction de contractions trop excessives et la précipitation du travail alors que le corps n'est pas prêt. Le déclenchement présente alors des « risques modestes mais non nuls.
L'utilisation d'ocytocine sur un col non encore mûr, aboutit à une discordance physiologique entre l'utérus qui se contracte et le col qui n'est pas prêt à se dilater.
C'est là qu'apparaissent les dangers.
Si les obstétriciens n'emploient pas tous la même méthode, ils ne sont pas toujours d'accord sur l'attitude à adopter dans certains cas particuliers.
Selon certains médecins, le déclenchement n'est pas recommandé lorsque la matrice, à la suite d'une césarienne, de l'ablation d'un fibrome ou d'une perforation due à une IVG, a été fragilisée.
La question se pose aussi face à une grossesse gémellaire et si le bébé se présente par le siège. Peut-on ou non déclencher sans risque ? Quand le col de l'utérus est favorable et en l'absence de problème médical particulier, la majorité des gynécologues-obstétriciens acceptent le déclenchement. On manque toutefois encore de données scientifiques pour affirmer que ces pratiques sont totalement sans danger.
Des raisons médicales
La moitié des accouchements déclenchés correspond à des situations d'urgence. Il n'est plus ici question de convenances de la mère ou de l'équipe obstétricale. La naissance doit être provoquée, pour des raisons médicales, lorsqu'on estime qu’un enfant est mieux dehors que dedans. Par exemple, quand le terme a été dépassé ou lorsque l'enfant ne grossit pas correctement dans le ventre de sa mère. Autre situation d'urgence : la poche des eaux s'est rompue prématurément, ce qui accroit le risque d'infection. Dans ce cas, l'accouchement sera déclenché.
À retenir
Dans la moitié des cas, l'accouchement est déclenché pour éviter de mettre l'enfant en danger. Pour qu'il soit sans risque, des conditions doivent être réunies : un terme de grossesse de plus de huit mois et demi, un col utérin qui est prêt ...
À lire aussi :