Chaque année, plus de cent mille couples divorcent. Plus de la moitié d'entre eux ont des enfants mineurs qui, après la séparation de leurs parents, vivent, dans 86 % des cas, avec leur mère. Parmi eux, malheureusement, 40 % n'ont plus que des relations très épisodiques avec leur père. Depuis le 4 mars 2002, la loi précise que "la résidence de l’enfant peut être fixée en alternance au domicile des parents ou au domicile de l'un d'eux". Aujourd'hui, aucun juge ne peut plus la refuser.
C'est aux parents de décider, et non à l’enfant
Dans 80% des cas, la résidence alternée est demandée conjointement par les deux parents. Dans ce cas, elle ne pose alors aucun problème. La loi a été changée afin qu'un juge ne puisse plus s'opposer au désir conjoint des parents, comme c'était le cas lorsqu'il devait obligatoirement indiquer une résidence principale. Quand seul l'un des parents la désire, le juge a trois possibilités : il donne raison à celui qui ne souhaite pas cette option ; il l'impose ; ou il ne prend pas de décision immédiate, et propose un essai de quelques mois ainsi qu'une rencontre avec un médiateur familial.
Dans cette affaire d'adultes, il est important que l'enfant soit protégé. Par conséquent, s'il peut exprimer son souhait et être entendu par le juge, il ne faut pas lui donner l'illusion que c'est lui qui décide du choix final. L'enfant n'est pas l'égal de ses parents : il ne doit pas porter la responsabilité d'un tel choix. Ces derniers, au contraire, lui doivent protection. Elle est nécessaire à sa construction.
À chaque âge, un rythme différent
La résidence alternée ne signifie pas nécessairement un "partage" à 50 % de l'enfant entre sa mère et son père. Pour son bien, elle doit être mise en place avec beaucoup de souplesse et évoluer dans le temps, en fonction de son âge.
L'enfant a moins de trois ans : il a besoin de continuité dans ses repères, ses habitudes, pour lui éviter d'être déstabilisé et angoissé. En même temps, pour que des liens affectifs forts se créent avec son père ou sa mère, il ne peut rester plus de deux ou trois jours sans les voir.
Alors, comment faire ? Il semble préférable que l'enfant vive dans un lieu fixe. En revanche, le parent qui n’en a pas la garde, en général le père, peut venir le prendre deux ou trois fois par semaine.
« Nous avons divorcé quand Zoé avait juste un an, se rappelle Florent, son papa. Je ne pouvais envisager de n’avoir ma fille que tous les quinze jours. Je voulais la voir faire ses premiers pas, prononcer ses premiers mots. Avec mon ex-femme, nous nous étions mis d'accord pour que je m 'en occupe tous les mercredis après-midi et tous les samedis. J'ai pu ainsi vraiment profiter de ses progrès. »
A partir d'un an, on peut envisager que le petit enfant passe une ou deux nuits ailleurs qu'à son domicile principal. Au fur et à mesure qu'il grandit, on peut augmenter les temps d'alternance.
De trois à dix-onze ans : la solution la plus couramment choisie est une semaine chez la mère, une semaine chez le père.
Mais, pour certains petits de maternelle, il peut être préférable de réduire l'alternance à quelques jours (cinq jours chez leur mère, deux jours chez leur père ou quatre jours et trois jours, par exemple).
À l’adolescence : les jeunes apprécient peu de déménager en permanence car cela complique leurs relations extérieures, notamment avec les copains, qui priment sur les parents. En général, quand ils conservent la résidence alternée, ils préfèrent fonctionner par quinzaine.
« Au départ, je vivais une semaine avec ma mère et une avec mon père. Les copains qui n'étaient pas du collège ne savaient jamais ou me joindre, précise Mathieu, 14 ans. Maintenant, je vis chez ma mère et je fais des escapades régulières chez mon père. On dîne ensemble et je dors chez lui, on se fait un ciné ou un foot le week-end. »
A l'adolescence, il faut faire attention au jeune qui, subitement, déclare vouloir vivre chez l'un de ses parents. Il ne faut pas que ce choix se fasse pour des raisons de plus grande liberté, voire de laxisme total du père ou de la mère.
Être élevé par ses deux parents
Après un divorce, un quart des enfants vivant en résidence principale avec leur mère perdent contact avec leur père.
Grâce à la résidence alternée, l'enfant conserve ses racines maternelles et paternelles. Ce qui est très important, car le père n'est pas une mère "bis". Par rapport à la mère qui a plus tendance à couver son ou ses enfants, on sait que le père a un effet plus stimulateur sur eux.
Le suivi de l'éducation de l'enfant se fait également à deux : « En vivant un peu chez maman et un peu chez papa, je suis presque comme mes copains, explique Gaspard, 9 ans. En tout cas, sur mon cahier de correspondance, il y a les signatures de mon père et de ma mère. Ce n 'est pas toujours le cas de mes amis dont les parents sont divorcés. »
La résidence alternée évite également à l'enfant de vouloir prendre la place de l’autre parent, comme ce peut être le cas en résidence principale :
« Elliot, qui a 5 ans, voit très rarement son père. Ce dernier habite à l'autre bout de la France, explique Caroline, sa mère. Pratiquement tous les soirs, il veut dormir avec moi. Je dois me fâcher pour qu’il sorte de mon lit et aille dormir dans sa chambre, après que l’on se soit fait un câlin. »
Une semaine sur deux ou tous les quinze jours, l'enfant doit faire une pause dans sa vie avec son autre parent. Si les parents refont leur vie, la résidence alternée évite à l'enfant d'arriver comme un "visiteur" dans cette famille recomposée.
Des contraintes à ne pas négliger
Après un divorce, on est tenté de s'éloigner l'un de l’autre. Or, opter pour la résidence alternée nécessite de vivre à proximité pour que l'enfant garde ses habitudes (même école, mêmes activités extra-scolaires...).
Une bonne organisation est également très importante. Il faut veiller, par exemple, à ce que l'enfant n'oublie pas ses cahiers chez l'un de ses parents, sous peine d'être puni à l'école.
Certains vivent mal de devoir faire leur valise toutes les semaines et d'arriver avec à l'école. Quand c'est financièrement possible pour les parents, il est préférable que chaque parent ait des vêtements et des jeux pour que l’enfant se sente chez lui, aussi bien chez sa mère que chez son père.
Pas question, non plus, de lui allouer le canapé pour dormir. C’est envisageable quand l'enfant voit son père un week-end sur deux, mais pas lorsqu'il vit à "mi-temps" chez lui. Il est important de lui prévoir une chambre, afin qu'il se sente bien.
Quand l'enfant va mal, que faire ?
Un comportement qui change, de la tristesse, un repli sur soi, des résultats scolaires en baisse... la garde alternée serait-elle en cause ? Peut-être. Si elle permet de continuer à vivre à la fois avec sa mère et son père quand les parents ont décidé de se séparer, elle ne représente pas toujours la solution idéale. Il faut parfois l'abandonner et revenir à un système qui convient mieux à l'enfant.
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